Voilà une photo rapidement prise du bâtiment de la SEMIDEP (on pourra voir un plan d'étage courant sur le site du projet sur architopik) :
Cette partie de la rue de la Fontaine au Roi est, il est vrai, particulièrement ingrate : on y trouve notamment (en amorce à droite sur la photo) un volumineux bâtiment opaque très peu urbain. Mais le projet de Niget semble vouloir compenser la laideur du site en y ajoutant, en plus, le ridicule et la prétention. Claude Schnaidt, dans un article consacré à Roland Schweitzer et à Roland Simounet dit de ces derniers qu'ils "témoignent par leurs œuvres (...) que les hommes ne sont pas condamnés aux clapiers ou aux cavernes". Niget réussit dans son projet, lui, à faire les deux en même temps: les chambres sont des cavernes et le bâtiment est un clapier.
Quant au texte qu'écrit l'architecte sur le projet, le voici :
" La masse bâtie vient alors se dessiner assez simplement, à l'image d'un grand pignon plan, qui révèle en filigrane son histoire, le volume offre une façade nord, lisse, largement percée, au-dessus d'un rez-de-chaussée qui laisse filer le regard jusqu'au cœur d'îlots. Comme Georges Perec l'a déclinée, cette façade, la nuit venue, révèle alors le fonctionnement de la résidence, derrière une peau d'écailles en verres colorés translucides, un jeu d'ombre joue le spectacle du quotidien. L'intimité préservée par la distance, la hauteur, l'occultation possible, et l'opalescence des écailles couvrant le vitrage en imposte, ne nuit pas pour autant au jeu abstrait des ombres. Ces fenêtres sont autant de "boîtes" offertes au résident, extension de leur plan de travail, elles permettent, en toute quiétude de s'asseoir dans le paysage urbain qui s'anime en contre bas et d'attraper les derniers rayons du soleil qui se couche dans l'axe de la rue. Ainsi la fenêtre devient habitée, fenêtre-banc dans une chambre ou toute surface se doit d'être exploitée. La façade dans laquelle viennent se tramer ces évènements est pincée entre deux mitoyens et, pour renforcer cet effet, un chanfrein est pratiqué en vertical sur toute la hauteur de la saillie du volume. Une saillie détalonnée des limites de parcelle qui permet d'avancer un "ventre" au volume et de gérer le fort décalage en plan d'avec la parcelle du 14 de la Rue Morand.
En partie haute, ce jeu de facettes fuit jusqu'au plafond du gabarit et dessine depuis le bas de la rue un pignon effilé.
En écho au projet voisin de résidence pour étudiants, ces façades sont traitées selon un principe général couvrant l'ensemble de la peau. Un principe élémentaire d'écailles colorées en fibre-ciment recouvre l'ensemble des faces, rampants compris, jusqu'à habiller la sous-face du R+1. Seules les fenêtres viennent perturber le réseau, des percements simples, en partie basse qui se diluent dans le flou translucide des écailles de verre coloré. Ce banal motif en losange qui couvre de nombreux pignons du tissu faubourien est ici détourné, amplifié, tissé à l'infini jusqu'à servir de modèle au rythme de la métallerie qui clos le niveau bas d'accès et les pièces de service de l'équipement".
j'avoue mon admiration devant le talent de dire autant sur aussi peu... On ne sait quoi commenter : la référence à Perec (la nuit venue, on voit les gens à travers les vitrages... ) et le lyrisme pour parler d'une fenêtre carrée où justement, la perspective intérieure montre qu'il ne se passe rien.... pas d'appropriation, pas de balcon, pas de vue latérale... Rien. Mais après tout, qui demandait quelque chose? Il n'y a que des gens qui habitent là, et qui sommes-nous pour demander à l'architecte d'avoir un peu travaillé, et de leur offrir un peu plus qu'un couloir minable en fait de chambre?
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