On découvre souvent des projets étonnants sur la toile. Là il s'agissait d'équipes qui avaient été sélectionnées à un concours où nous étions candidats. On tombe sur le site d'une agence de naja de base, on rigole bien devant toute sorte de projets remarquablement sans intérêt, mais voilà qu'on s'arrête là-dessus. Il ne s'agit donc pas simplement d'un projet nul, comme celui- ci (qui est un remarquable hommage à Vasarely ou à la façade de bureaux tellement années 70 de l'avenue Matignon, maintenant déposée), mais d'un projet qui dénote une singulière absence de compréhension de ce qu'est la forme parisienne.
Il y avait là un petit bâtiment existant banal et bien proportionné, sans cachet particulier mais qui semblait tenir sa place dans le paysage parisien, avec un petit côté "public" en pavillon que nos amis ont soigneusement détruit. Ils lui ajoutent une "volumétrie simple, rigoureuse et radicale" (sic... ah, quand la paresse se pare des vertus du minimalisme, c'est magique) pour en faire un bâtiment parfaitement ridicule, le pauvre. Il semble imité des jeux d'enfants sur catalogue, aux couleurs criardes, qu'on voit dans son jardin devant; il ne ressemble plus à rien, avec ses étoiles rapportées qui évoquent plus une chambre d'enfant relookée par Valérie Damidot qu'un bâtiment public.
Encore une fois, ce n'est pas juste la médiocrité des architectes qui est en cause. C'est, me semble-t-il, le symptôme d'un problème plus vaste, qui signale l'inculture des projeteurs et leurs incapacité à comprendre la ville (ici Paris) où ils travaillent.
Je ne parle pas de règles ou de traditions à respecter, mais d'une connaissance intime du lieu et de sa logique formelle. Celle qu'a Scarpa de Venise quand il fait la Querini Stampalia ou, dans un registre très différent, celle qu'ont Chemetov et Huidobro quand ils dessinent le ministère des Finances. Cette compréhension que n'ont pas les services de la voirie parisienne quand ils dessinent les couloirs de bus du boulevard Saint-Marcel : ils procèdent d'une logique incompatible avec la perception qu’on a des boulevards parisiens.
D'où vient cette inculture? Elle est peut être un des révélateurs de la crise de l’enseignement, partagé antre deux branches apparemment opposées mais finalement assez proches : l'histoire de l'architecture enseignée comme une discipline "livresque" (je ne trouve pas le bon mot : sans compréhension du projet, disons) et la vision "artiste" et Beaux-Arts du projet ("je pose mes tripes sur la table"). Là, nos amis de RH+ sont incapables de comprendre ce qui fait la petite qualité du bâtiment existant, et le rendent finalement grotesque. Dominique Alba doit adorer ce projet.
Dans un registre un peu semblable, on trouve les tas de Jakob et McFarlane près de la porte du Pré Saint-Gervais: leur idée du "faire parisien" semble se limiter à un coup de peinture maronnasse (mais il faudrait revenir sur ce projet particulièrement médiocre en en analysant les plans).
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